Évoquer le cas d’un Hamster dans les articles poilus mensuels peut être un peu déroutant et pourtant le cas du Grand Hamster d’Alsace nécessite l’attention tout autant que la situation du loup, du lynx ou de l’ours pour ne citer qu’eux. Le Grand Hamster d’Alsace est l’une des 4 espèces classées en danger dans notre pays par l’IUCN, l’espèce fait partie de la longue liste rouge de cette grande instance. Pourtant ma connaissance du rongeur reste assez pauvre, le traitement qui lui est fait me rappelle celui du lynx dans l’absence presque totale d’information, le Grand Hamster est néanmoins l’une de ces espèces en grande souffrance dans notre pays.
On s’en doute un peu mais ce Hamster a d’abord prospéré pendant des milliers d’années, presque 12.000 en fait. Mais forcément, à un moment donné, tout a basculé. Le changement radical de situation pour ce petit poilu au ventre noir s’est fait dans les années 30, à cette époque on estime que le rongeur est un nuisible qui fait vraiment trop chier les agriculteurs à grignoter l’équivalent de 7kg par an de végétaux et qu’il faut donc commencer un peu à élaguer la population. Résultat, dans les années 60, on peut presque parler de frénésie destructrice de l’espèce qui se voit piégée, empoisonnée, noyée, bref, éradiquée, avec parfois même des récompenses à la clé. Le XX° verra l’espèce disparaître à 90% et ça ne sera qu’à la fin du même siècle, en 1993, qu’on tirera la sonnette d’alarme suffisamment fort pour que le massacre s’arrête ou au moins se calme et pour que l’espèce soit classée “espèce protégée”. Aujourd’hui on compte moins de 1000 individus répartis dans 3 voire 4 zones de répartition principales quand au début du XX° on trouvait le Grand Hamster d’Alsace partout dans la région.
Du coup, si les traques et massacres du rongeur ont cessé, pourquoi l’espèce n’a pas retrouvé sa viabilité depuis la mise en place des programmes de protection ? Ces programmes sont censés être actifs depuis 1993, 25 ans donc qu’on s’inquiète pour la pérennité du Grand Hamster, 25 ans qu’il n’a pas atteint le seuil de viabilité fixé à 1500 individus. Déjà on peut blâmer la lenteur de l’Etat dans la mise en place des mesures de protection, il a fallu attendre l’année 2000 pour qu’un premier plan de sauvegarde voit le jour. Ensuite il faut tout simplement blâmer le progrès, puisque les principales causes de la disparition du Grand Hamster d’Alsace tiennent à la culture de produits de “printemps” type maïs, qui ne permettent pas au Grand Hamster de se nourrir convenablement, il est plutôt friand des céréales d’hiver comme le blé, mais aussi à la fragmentation de son habitat par les routes, l’utilisation de pesticides, la culture intensive (du maïs souvent) qui donne des parcelles gigantesques et hostiles pour le rongeur.
Ainsi pour espérer revoir le Grand Hamster d’Alsace prospérer dans les campagnes il faudrait revenir à une agriculture raisonnée et plus respectueuse de l’environnement, insurmontable pour beaucoup mais heureusement de plus en plus d’agriculteurs, conscients de la problématique, mettent en place des doubles cultures qui permettent au rongeur de survivre. Je ne remets évidemment pas en cause les difficultés des agriculteurs dans un pays ouvert à tous les commerces et semblant tendre à une ouverture qui pourrait encore plus miner notre agriculture nationale.
Pourtant il est assez clair, dans le cas du Grand Hamster d’Alsace comme pour toutes les autres espèces que j’ai déjà évoqué, que la solution réside dans le parfait accord entre l’homme et la nature, un accord et équilibre qui reste parfois compliqué à trouver. Heureusement pour les rongeurs, depuis de nombreuses années, des associations prennent leur parti et s’occupent de faire grossir les populations pour les relâcher ensuite dans cette nature aux relents légèrement hostiles.
Un peu comme dans les pays du continent africain, les associations font aujourd’hui le pari d’éduquer ceux qui craignent de voir leurs récoltes ravagées puisque c’est par cette éducation qu’on arrive à comprendre que, comme dans le cas de beaucoup d’espèces, les dérèglements qu’on subit sont souvent dus à la disparition d’un maillon dans la chaîne. Le Grand Hamster d’Alsace, toute espèce nuisible qu’elle fût, est aujourd’hui considérée comme une espèce parapluie c’est à dire l’une de ces espèces qui atteste de la bonne santé de la biodiversité.
Les efforts pour la préservation du Grand Hamster portent-elles leur fruit ? A priori oui puisqu’en 2015 l’ONCFS a pu observer une augmentation de l’aire de présence du rongeur, quelques efforts supplémentaires dans les prochaines années permettront peut être de lui faire atteindre le seuil des 1500 individus.
Comment aider le Grand Hamster d'Alsace ?
En parler autour de vous
Avoue, tu l’attendais celle-là. Alors oui, je suis redondante sur le sujet mais qui osera me dire que ce n’est pas LA solution pour faire connaître une problématique et sensibiliser sur un sujet ? Alors évidemment, parler Hamster comme ça entre le plat et le dessert c’est assez peu commode.
Quelques astuces :
- si tu passes devant une animalerie avec de mignons petits hamsters, t’as une occasion en or de faire le lien avec les Hamsters sauvages qu’on a chez nous ;
- si on te parle jambon (ham en anglais), c’est la porte ouverte à la problématique du Grand Hamster d’Alsace ;
- et puis, forcément, si on te parle Alsace ou tout ce qui tourne autour (la choucroute, le kouglof ou encore les accents bizarres qu’ils ont là-haut) c’est évident qu’il faut caler un petit discours sur le Grand Hamster d’Alsace.
Soutenir les associations
- Le Projet Life Alister, programme financé par l’Europe plutôt qu’association, est totalement impliqué dans la protection du rongeur et propose même un petit jeu pour s’informer sur la protection du Grand Hamster (disponible sur Google Play et l’App Store), vous y incarnez un Hamster pendant plusieurs mois, vous y recherchez de la nourriture, trouvez une femelle et évitez les dangers de votre environnement. Il est vraiment bien fait, intéressant, ludique et instructif !
- Sauvegarde Faune Sauvage est une autre association qui oeuvre pour le Grand Hamster d’Alsace mais aussi contre le braconnage sur le continent africain. Je suis l’association depuis ma rencontre avec son fondateur alors que j’œuvrais pour Kalaweit à Lyon, une personne que j’admire beaucoup pour tout son travail et son engagement !
Faire du bénévolat
S’occuper directement des Hamsters est possible ! En particulier avec l’association Sauvegarde Faune Sauvage qui cherche régulièrement des volontaires pour s’occuper de ses petits protégés. N’hésitez donc pas, si vous habitez dans le coin, à vous proposer.
Merci à LIFE+ Alister de m’avoir transmis les photos de ces adorables Grands Hamsters d’Alsace.
En lien avec le sujet
En plus des explications lues sur les sites des associations je vous propose aussi de lire cet article terriblement bien écrit sur le blog Defi Ecologique sur la protection du Grand Hamster, un article du 20 minutes sur lesdites doubles cultures, le rapport de l’ONCFS sur le Grand Hamster, et puis une étude édifiante, en anglais, sur l’impact du maïs sur les Grands Hamsters d’Alsace (ça rend les mamans cannibales !).
5 Commentaires
Ça me fait bien plaisir que l’on parle un peu plus des petits animaux, qui sont autant importants que les grands mammifères 🙂
Qui sait, ton prochain article sera peut-être consacré aux insectes ^^
Les mentalités commencent à changer chez les agriculteurs comme tu l’as explique et c’est tant mieux pour eux comme pour nous et la biodiversité, mais les lobbies ont encore beaucoup de pouvoir malheureusement.
Espérons que les nouvelles générations d’agriculteurs et les politiques sauront s’en affranchir 🙂
Les petites espèces méconnues méritent aussi leur place chez moi 😀 Figure toi qu’un article sur les vers de terre me titille depuis un moment… A voir si j’irais jusqu’à en faire sur les insectes, ils ont aussi leurs rôles dans les écosystèmes même si ce n’est pas les plus glamours dans nos esprits 😀
J’espère aussi que les pouvoirs publics et l’Etat réussiront à gagner en autonomie face aux lobbies, c’est vraiment eux qui dirigent le jeu, le simple fait de l’accepter est inacceptable ! On est géré par l’industrie intensive, je trouve ça vraiment dramatique… Je soutiens vraiment les éleveurs et les producteurs qui se tournent vers le bio et le responsable 🙂
Ils sont tellement mignons! J’adore tes articles sur les animaux… n’oublions pas que nous partageons la Terre et qu’elle n’appartient pas qu’aux humains!
Merci Amélie 🙂 Ils sont vraiment adorables ! C’est dommage, si j’habitais plus près j’aurais sauté sur l’occasion de pouvoir faire du bénévolat là-bas 😀
C’est un de nos devoirs que de ne pas nuire aux autres.
Le “petit” Grand Hamster d’Alsace en fait partie.
Merci pour ton article
😉