Voilà quelques jours que je suis rentrée d’Aude et mes baskets me démangent déjà. Les montagnes m’appellent, je les observe tous les matins depuis mes fenêtres, j’en ai des fourmis dans les pieds. J’aime le relief de la Savoie, à la fois rocheux et végétal, chaque fois que j’observe nos belles montagnes des Alpes, j’ai comme la sensation de toucher la pierre du bout des doigts. Granuleuse et râpeuse, elle passe les saisons, toujours aussi belle été comme hiver. Si je ne m’en approche pas trop en hiver, étant équipée comme une grosse quiche, l’été tout mon corps fourmille d’envie de chausser mes vieilles baskets et de grimper dans la montagne. Alors voilà, le jour est enfin arrivée, je profite d’un dimanche ensoleillé, mais plus frais que d’habitude, pour mettre mes fringues de rando, glisser mes pieds dans mes baskets, les fesses dans la voiture, je roule à quelques dizaines de minutes de chez moi, direction le Lac de Savine.
Vers le Lac de Savine sur l'ancienne voie carolingienne
Pourquoi aller au lac de Savine ? Honnêtement je n’ai pas trouvé beaucoup d’informations sur ce lac et d’ailleurs l’itinéraire que j’ai emprunté ne l’a pas été parce que j’ai pu le connaître sur un quelconque site mais parce que je l’ai découvert sur une carte. Le lac de Savine est un grand lac au cœur du Parc national de la Vanoise. Pas très connu sur l’Internet, il serait néanmoins l’un des passages hypothétiques d’Hannibal lors de son franchissement des Alpes. Evidemment, cette information je ne l’ai découvert qu’une vois arrivée au début du sentier de randonnée.
Je débute donc ma randonnée à partir du Planay, un lieu-dit au-dessus de la commune de Bramans en Maurienne. S’il est possible de rejoindre le lac de Savine en passant par le Petit Mont-Cenis (l’ascension dure alors 1h45), commencer ma randonnée à partir de là m’a permis d’écourter mon temps de trajet en voiture, même si la balade s’en est trouvée rallongée de 45 minutes.
Ces quelques minutes de plus n’ont pas été vaines. Déjà parce que le passage dans les bois au-dessus de Bramans m’a permis de découvrir de belles petites chapelles, mais aussi parce que le cadre à quelques minutes du parking est déjà un ravissement. Les maisons d’altitude ont un charme bien à elles, vous ne trouvez pas ? Une fois la voiture posée, un peu plus loin que le parking au pied du sentier, je traverse le lieu-dit et m’imprègne déjà de la beauté des petites maisons de bois. Je quitte rapidement ces terres habitées et je m’engouffre sur le chemin qui me mène vers le lac de Savine.
Dès le début du sentier je découvre donc les fameuses plaques explicatives qui m’apprennent qu’Hannibal serait passé par ici pour faire entrer ses troupes sur le territoire. Tout au long du chemin j’en découvrirai d’autres qui questionneront cette probabilité de diverses manières.
Mes premiers pas se font donc dans un milieu forestier. Les herbes sont si hautes qu’elles m’arrivent à la taille et pourtant le petit chemin de randonnée est là, étroit mais bien présent dans cette jungle de montagne. J’évolue les bras en l’air ou presque pour éviter un quelconque contact des herbes avec ma peau, oui je suis un peu en guerre contre les tiques, on ne sait jamais ! Ceci-étant je profite du paysage et surtout… des odeurs ! Je crois que j’ai rarement vu de ma vie de randonneuse un milieu si riche en végétation et en insectes. Autour de moi s’étale des parterres de fleurs plus colorées les unes que les autres, c’est ici une explosion de bleu, là-bas un feu d’artifice de jaune et à ma droite un tapis de rose. Les odeurs se mélangent et les bruits sont presque aussi exquis. Ça butine de tous les côtés, des milliers d’insectes volent autour de moi, des papillons de toutes les couleurs passent de fleurs en fleurs dans un incessant ballet d’ailes.
Ces quelques distractions me font presque oublier l’ascension dans laquelle je suis engagée. Selon ma carte en environ 2km de marche je prends 500m de dénivelé pour atteindre la première intersection qui mènent au col du Petit Mont-Cenis puis au lac de Savine. La montée est parfois assez rude, pentue, abrupte. Le sentier caillouteux laisse parfois la place à de gros blocs lissés par l’eau et les pieds de mes prédécesseurs. Et quels prédécesseurs ! Si l’on met Hannibal de côté, le sentier que j’emprunte est aussi l’ancienne voie carolingienne passant les cols du Petit et du Grand Mont-Cenis, cette voie datant du 8ème siècle. J’imagine donc aisément quelques moines passant les cols avec leurs ânes, posant leurs pieds là où je pose les miens, écartant les branches que j’écarte, humant les odeurs qui me viennent au nez.
Je me perds donc en rêverie, pourtant le chemin ne cesse pas de monter. L’air rendu doux par la protection des grands sapins qui me dominent est vraiment une chance, malgré une journée plus fraîche que d’habitude, le soleil reste mordant. Après une bonne heure d’ascension, je change de décor, les pins et les fleurs laissent place à un décor plus parsemé, les arbres ne forment plus une forêt mais des petites touffes éparses. La montée est toujours aussi ardue. Si le dénivelé est plus doux, le terrain fait d’un amas de blocs de pierres lisses est légèrement compliqué. Je grimpe plus que je ne marche à certains points et le retour sur un sentier réglementaire, qui me permet de marcher le nez en l’air, est vraiment appréciable.
A travers le Vallon de Savine
J’arrive finalement à mes 2169m et cette fameuse intersection. Je redécouvre alors la présence humaine, en 1h30 d’ascension à travers la forêt je n’ai croisé que 2 personnes que j’ai rapidement abandonné dès le début de la montée. Il faudra donc faire avec cette présence de randonneurs et de randonneuses dont beaucoup d’Italien.e.s qui me regardent souvent comme 2 ronds de flan lorsque je prononce le “bonjour” rituel de la randonneuse à un.e autre marcheur.se. Bon, peu importe, je fais abstraction des personnes autour de moi pour continuer ma route avec le même rythme. Très vite, je me rends compte que les quelques pins qui subsistaient depuis ma sortie de la forêt laissent toujours plus de place à une herbe verte et à quelques fleurs. Une dernière descente, un court d’eau qui dévale la montagne et me voilà vraiment dans le vallon.
Son immensité me laisse pantoise, étourdie. Je regarde avec un sourire sûrement stupide cette étendue d’herbe verte et, à l’horizon, cette montagne encore saupoudré de neige. Le vallon de Savine est beau. Au final je dirais même qu’il est plus beau que le lac de Savine lui-même et qu’il devrait être la raison principale d’une randonnée dans cette zone. Le lac est alors une finalité, un point d’arrivée qui scelle une marche de plusieurs heures à travers la forêt puis ce magnifique vallon. En plus d’être beau, c’est plat. Mes pieds apprécient énormément ce moment d’accalmie dans l’effort et je gambade presque sur le sentier qui m’amène vers le lac à deux kilomètres de là.
200 mètres de dénivelé, voilà ce que m’annonce la carte entre le début du vallon et le lac de Savine. A piece of cake comme dirait les anglais (si tu as la trad en italien je prends aussi). Après avoir fait plus du double sur la même distance en première partie de mon ascension, je ne vous dit pas l’air de promenade que prend cette randonnée. Je gambade donc dans le vallon, enjambant les petits ruisseaux formés par la fonte des neiges. Ces petits ruisseaux sont en fait l’unique difficulté du vallon, en tout cas jusqu’à l’arrivée proche du plan d’eau. La plupart de ces petits ruisseaux sont traversables en marchant de pierre en pierre, mais ce n’est pas le cas de tous. Me voilà donc arrivée devant cette impossibilité de sautiller joyeusement d’une pierre à l’autre sans me mouiller. Le ruisseau, trop abondant, a avalé les pierres dans son lit. La seule solution est donc de respirer un grand coup et d’y aller. En quelques pas j’ai le bas du pantalon trempé et je ne vous parle pas de mes chaussettes et de mes chaussures. Pragmatique, je pense déjà à l’état de mes pieds à l’arrivée après avoir baigné dans le jus de chaussette pendant quelques heures. Ce petit moment rafraîchissant a quand même un avantage : il suffit d’un passage hésitant pour ne plus jamais avoir peur de mettre la chaussure dans l’eau. Je transperce donc de mes baskets tous les autres cours d’eau qui auraient inondé les ponts de pierre et je continue ma montée toute douce vers le lac de Savine.
2h45 après le début de mon ascension, je pose me fesses sur un gros caillou face au lac de Savine. La montée jusqu’au lac a été la partie la plus ardue du vallon, je slalome entre les pierres et mes pieds commencent doucement à râler de tous ces efforts. Je suis donc assez satisfaite de pouvoir enfin me poser, à l’abri du vent derrière une grosse pierre, mon eau dans une main et mes noix de cajou dans l’autre.
Une fois assise, la perspective au loin est comme coupée me donnant presque l’impression d’une fin réelle de ce bout de terre. Le lac de Savine semble alors comme perdu au milieu des montagnes qui le domine. Si j’ai la satisfaction d’être arrivée, le bonheur et le ravissement a surtout été tout au long du chemin. Les dizaines de cascades, petites ou grandes, qui parsèment le sentier du vallon sont magnifiques, les ruisseaux qui coupent le sentier, plus que d’être enquiquinants, sont un rappel que la nature est reine sur son territoire.
Après une petite pause bien méritée, je me relève péniblement, resserre mes chaussures et repars en sens inverse pour redécouvrir le vallon. Parce que oui, l’aller comme le retour ont été des découvertes. Si je me retournais quelques fois sur le chemin du lac, je m’obligeais presque à aller uniquement de l’avant sans regarder derrière moi pour avoir l’impression de découvrir un nouveau paysage lors de ma descente vers Planay. Et vous savez quoi ? Ça a marché au-delà de mes espérances, la descente, même si elle a été assez douloureuse pour mes jambes fatiguées, fût une redécouverte surprenante des beautés du Parc national de la Vanoise. Le constat, lorsque je repose mes fesses dans la voiture quelques heures plus tard, est que j’aime cette région plus que je n’en aime aucune autre. La Savoie est vraiment la plus belle et merveilleuse des régions du monde, non ?
Aller au Lac de Savine - Informations pratiques
2443m d’altitude
Possibilité de le rejoindre depuis Le Planay (randonnée de 3h15 aller) ou depuis le parking du Petit Mont Cenis (1h45 aller).
Depuis Planay – 823m D+, 17km A/R
Difficulté depuis Le Planay en été : moyenne, la difficulté principale se situe dans le dénivelé au début du parcours.
3 Commentaires
Le vallon de Savine est effectivement un très bel endroit – parmi tant d’autres en Maurienne ! Une fois au lac, dommage de ne pas poursuivre jusqu’au col Clappier qui offre une jolie vue sur le versant italien. A la montée ou la descente il est possible de faire une boucle depuis la fameuse “plaine”, bien jolie du reste, en passant par les lacs Perrin. Une variante intéressante. Hâte d’y retourner !!! Merci pour cet article 🙂
Merci pour le conseil, j’irais dès que nous pourrons remettre le nez dehors ! La rando est en plus assez accessible à part un début un peu rude. L’arrivée au vallon est une belle récompense 🙂
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