Raconte moi ta vie – 2 mois et le mal du pays

Vous vous souvenez de votre tout premier voyage ? Celui qui ne s’est pas passé comme prévu mais grâce auquel vous vous êtes vu grandir, prendre des décisions que jamais vous n’auriez prises chez vous, dans votre bulle. Vous vous souvenez ? Je suis en plein dedans, je grandis un peu plus chaque jour, prête à affronter l’Afrique, ses centaines de cultures différentes, ses matatus avec une sono de Jacky fan de tuning, son absence de croissants et de baguettes croustillantes. Je grandis en Afrique.

J’ai le mal du pays les gars, ça y est. Mon beau pays me manque, les gens qui respectent l’espace vital des autres et font tout pour ne pas se coller à vous dans les bus, ceux qui pensent à mettre du déo tous les matins pour ne pas imprégner son odeur naturelle sur son voisin après des heures de bus, ceux qui ne mettent pas leur musique à fond sur leur téléphone parce qu’ils ne supportent pas le silence ( ah on a ceux là aussi en France en fait ). Les gars, j’ai décidé d’être honnête avec vous, l’Afrique c’est tout ce que vous n’imaginez pas ou en tout cas c’est beaucoup de choses que je ne m’imaginais pas.

Adieu étendues sauvages, camping au bord d’une falaise pour regarder le coucher de soleil avec Prince Charmant qui se détache à l’horizon, adieu vision idyllique et rêve de gamine de 12 ans. A quelques semaines de voir le Serengeti je dresse le bilan de mes premières semaines sur le continent, mes premiers mois en Afrique.

Déjà 2 mois ! Déjà 2 mois que j’ai pris l’avion pour le Rwanda, toute seule à l’aéroport Paris Charles de Gaulle. 2 mois que j’ai dis au revoir à mon beau pays de France où je me sentais étouffée, 2 mois que j’ai embrassé pour la première fois ma destinée de voyageuse solo. Bon plus trop solo maintenant mais quand même voyageuse.

2 mois, ça change quoi ?

2 mois ça change tout ! On entame le 3ème mois en Afrique et je prends conscience du chemin parcouru que ce soit littéralement ( déjà 3 pays ! ) que mentalement. L’Afrique c’est dur, l’Afrique même si tu ne t’y attends pas te prends aux tripes et parfois pas de la meilleure des façons.

Quand mes amis me parlaient de l’Afrique ils me parlaient de l’Afrique de l’Ouest, destination où ils avaient eu l’occasion d’aller. Comme ces bons voyageurs qui parlent d’expérience ils m’ont décrit une Afrique qu’ils pensaient que j’allais rencontrer avec presque la condescendance bien connue chez ce voyageur expérimenté ( Elle en parle si bien ! ). Bon les gars, je vais vous apprendre un truc, très simple et tellement plein de la condescendance de mon nouveau statut de voyageuse : l’Afrique de l’Ouest c’est pas l’Afrique de l’Est. En fait l’Afrique de l’Est c’est tout ce dont je ne m’attendais pas. Je ne parle pas du Rwanda ou de l’Ouganda qui ont été des pays que j’ai relativement bien vécu, où j’ai pu me faire graduellement à la nonchalance de certaines personnes, à mon nouveau prénom (Mzungu) et à mon nouveau statut d’attraction sur pattes (bon il y a parfois où ça m’agace toujours, j’avoue). Le Rwanda et l’Ouganda ont été tendres avec moi, je les ai relativement bien vécu humainement parlant ( moins niveau conservation et politique ), le Kenya par contre… Oh le Kenya. Ça pique un peu !

Le silence, tu oublieras. Les bass tu supporteras

Prince Charmant et moi on se retrouve plutôt bien sur un point : on aime la Nature. Malgré mon statut de citadine et le fait d’avoir vécu 7 ans dans une grande ville il y a des choses que même quelqu’un qui aurait vécu dans un quartier des plus agités de l’une de nos villes européennes ne pourrait pas supporter c’est… le bruit ! Là vous vous dites que je fais ma précieuse, je vous invite donc à nous rejoindre au Kenya pour expérimenter le vrai bruit. Les kenyans n’aiment pas le silence et ont cette vision du calme totalement décalée de sorte que lorsqu’on demande une chambre calme dans un hôtel d’une petite ville on se retrouve à supporter des bass à point d’heure ou des gens qui ont décidé, comme par hasard, de se mettre à parler très fort devant votre porte !

Alors c’est là que ma vision du Kenya s’effondre, que mon rêve de passer mon temps à gambader joyeusement dans la Nature et à dormir au milieu de la savane s’effondre. Je pourrais le faire vous allez me dire mais bon, mon statut d’étrangère m’obligerait à payer un prix exorbitant pour le faire sous 2 prétextes : je suis étrangère donc j’ai de l’argent et j’ai de l’argent donc je peux payer l’entrée d’un parc national 70$ et un emplacement de tente à 30$. Oui car toi, étranger, tu ne le sais pas encore mais tu es forcément péter de thunes ! ( moi je suis pas trop au courant perso ). Tu pourras donc te permettre de payer 3 fois le prix de ce qu’un local paye pour faire les mêmes choses que toi à la différence que toi, étranger, tu ne pollueras pas des lieux magnifiques avec ta bouteille en plastique pourrie d’une quelconque compagnie. Etranger, tu es propre et respectueux de l’environnement, tu payes et tu te tais.

Bon je parle pour nous, on aime la Nature, on la respecte alors forcément voir des déchets au pied d’une cascade ( par exemple ) ça nous sort par les trous de nez. Ceci mis à part je pointe un fait qui est vraiment détestable en Afrique, le prix Mzungu.

Prix Mzungu : prix multiplié au minimum par 2 pour toute personne étrangère au territoire ou à ses alentours et pour toute activité même les plus aberrantes type hébérgement.

Oui Mzungu, si tu viens au Kenya prépare toi à t’entendre dire que dans certains endroits tu devras payer ton lit plus cher que ton voisin local. Pour quelle raison ? Le mystère reste entier.

Le pouvoir du voyage tu ressentiras

Vous avez déjà voyagé aussi longtemps ? Vous, votre sac ? Je ne parle pas du voyage au Larzac que vous entreprenez tous les étés, non je vous parle de ce saut dans l’inconnu, celui qui vous prend comme un pet de mouche, celui qui vous transporte quand vous y pensez quelques heures avant d’embarquement. Ce premier grand voyage on vous dit qu’il va vous transformer.

C’est sûrement sur ce point que mes amis voyageurs ont eu raison, ce voyage là il me change, il me transforme. Alors qui étais-je avant mon départ en Afrique ? Et qui suis-je entrain de devenir après 2 mois de voyage ?

On pourrait dire que c’est court pour tirer un bilan de ce que ça a pu changer mais chaque voyageur pourra dire le contraire. Mes premières semaines seule j’ai fait des choses que jamais je n’aurais eu le courage de faire lorsque j’étais en France. Les semaines qui ont suivis je les ai vécus de la même façon, à trouver une assurance nouvelle dans chacune de mes paroles, dans chacun de mes actes.

La vérité dans ce type de voyage, loin de ses repères, sans arrêt en mouvement, face à des situations improbables c’est que l’adaptation se fait naturellement, elle doit se faire en fait. Elle est obligatoire. Cette adaptation je ne l’ai pas toujours eu et en même temps je me dis que je ne me suis jamais de ma vie retrouvée à presque minuit dans un aéroport africain à me rendre compte que personne ne m’attendait. De repenser à ces premières heures au Rwanda me fait sourire. Jeter dans le bain à la première minute de mon voyage, j’ai adoré, j’adore.

Alors le pouvoir du voyage c’est ça, c’est de faire ressortir tout ce que vous pouvez être au fond de vous, d’aller chercher aux contreforts de votre âme la plus petite étincelle de courage pour continuer à avancer même quand des difficultés arrivent. Parce qu’il y aura des difficultés et des désillusions, forcément, sortir de sa bulle de confort entraîne des problèmes, sortir de sa routine entraîne des difficultés que vous n’auriez jamais eu confortablement enfoncé dans votre canapé. Le bonheur du voyage c’est aussi ça, découvrir qu’on peut se sortir des situations les plus compliqués et puis se rendre compte que tout n’est qu’une question de choix. On s’en est rendu compte un nombre incalculable de fois déjà, toutes les fois où on veut nous faire payer plus parce qu’on est blancs, toutes les fois où on refuse, où on a tourné les talons pour choisir d’aller ailleurs. Le voyage apporte une facilité dans les choix, je ne me suis jamais autant senti libre de mes mouvements, de mes choix.

Après le voyage apporte aussi des désillusions et peut être même plus les premiers voyages. L’Afrique, je savais que très peu de voyageurs longue durée font escale ici et pour cause, même si la vie n’est pas excessivement cher, réaliser ses rêves en Afrique ça coûte cher. Tout se paye en Afrique. Alors quand on est arrivé au Kenya et qu’on s’est rendu compte qu’on allait devoir faire attention à notre argent j’ai du faire évoluer mon plan d’action. Évoluer à vite voulu dire que je devais modifier mes plans, supprimer des étapes, faire des choix que je n’aurais pas voulu avoir à faire. Mais ces choix sont fait et je sais que chacun d’entre eux va me permettre d’avancer, de passer les étapes les plus importantes, ces choix me permettent de continuer.

Je grandis en Afrique, je grandirai sur chaque continent de la planète, à chaque fois qu’on y mettra les pieds et qu’on aura à faire face à de nouvelles épreuves. Je grandis et malgré tout ce que je déteste sur ce continent je continue à aimer de plus en plus ce voyage.

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2 Commentaires

  1. Hey 🙂 J’aurais aimé écrire cet article… Tu as une belle plume et tu vas au fond des choses… Bravo! Oh, et merci pour la mention! 🙂

    • Merci à toi de m’avoir bien fait rire avec ton article sur les voyages qui ne nous rendent pas meilleurs ! 😉


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