Un boat-safari au Queen Elizabeth Park en Ouganda

Ou au QENP mais ça c’est pour les intimes ou ceux qui n’ont n’a pas envie de se farcir le nom complet. Nous voilà donc bien assis dans notre grosse voiture de safari, juste pour nous. On ne parle pas du promène couillons qui transporte 6 à 8 passagers pour les traîner sur les pistes poussiéreuses des parcs africains mais bien d’une voiture privative avec notre chauffeur, Sylvain, qui nous mène tout droit en direction du Queen Elizabeth Park, notre premier safari depuis mon arrivée en Afrique.

Le fait de faire un safari en Afrique peut sembler bien cliché “Oh regarde là l’autre avec son projet sur la conservation qui va faire la touriste de base avec son safari”. Merci à toi petit rabat joie qui a du mal à comprendre le but de mon voyage. Oui, le safari c’est le gros clicheton de l’Afrique, si vous venez en Afrique c’est probablement pour faire un safari que vous allez payer des centaines voire des milliers d’euros avant de rentrer chez vous avec un album plein de belles photos de la faune africaine et alors ? Ca serait stupide de passer en Afrique sans faire de safari, surtout avec un projet sur la conservation, quoi de mieux qu’un safari pour voir les parcs d’Afrique et apprécier leurs différences selon les pays ?

Notre safari à nous ne nous a pas coûté cher quand je vois ce que les gens dépensent en général mais dans notre budget il a laissé un gros trou, forcément. L’Afrique ce n’est pas le continent le plus cheap pour les voyages, loin de là, ça oblige à faire des choix, des concessions et à marchander ( Prince Charmant est doué pour le marchandage ). Quand vous venez en Afrique de l’Est il faut être prêt psychologiquement à cracher de la thune (ça vaut bien un peu de langage vulgaire), on va vous saigner aux 4 veines, vous ponctionner autant qu’on peut, vous trouver plein de raisons pour vous arracher votre oseille. L’Afrique et ses étendues de nature, c’est beau mais ça fait mal.

Un safari bateau sur le Canal Kazinga

On roule à toute allure dans le parc, on est en retard pour notre rendez vous à l’embarcadère. Notre chauffeur tente de faire les 22km qui sépare l’entrée du parc et les bateaux à la vitesse de la lumière, on croise les doigts pour ne pas croiser d’animaux sur la route, un paradoxe quand on est dans un Parc National. Frein à main, dérapage contrôlé sur le parking ( nan je déconne, on est arrivé tranquille mais ça rend moins bien dans vos têtes ), on descend de la voiture et on se présente comme des fleurs pour embarquer (“late ? Non on est pas late, on est pile à l’heure !”). Gilets de sauvetages orange flashy sur le dos on s’installe pour notre boat drive sur le canal de Kazinga.

Oui parce que même si on fait les touristes de base dans un parc national on aime quand même faire une petite variante en faisant un tour en bateau plutôt qu’en voiture, c’est moins clicheton !

Le canal Kazinga est un canal qui relie le lac George et le lac Edward (partagé avec le Congo). C’est un canal qui divise en 2 le parc et qui permet donc de pouvoir observer des animaux sur les 2 rives. Il est situé dans une partie du parc qui permet de voir en général des gros mammifères, quelques herbivores, des hippopotames, des crocodiles et beaucoup, beaucoup d’oiseaux et rapaces.

Tout au long du parcours on nous explique plusieurs points sur les différents populations du parc au fur et à mesure qu’on les rencontre durant la croisière. On croise beaucoup de buffles qui se rafraîchissent dans l’eau, des hippopotames qui nagent tranquillement près des berges ou sèchent au soleil sur le sable, un crocodile la gueule grande ouverte qui profite des rayons du soleil pour réguler sa température corporelle, quelques antilopes au loin et puis de magnifiques éléphants perchés sur une colline entrain de dévorer quelques arbustes ou un groupe entrain de se désaltérer avant de retourner se mettre à couvert loin des regards de ces êtres humains voyeuristes.

Cette eau justement où tous ces animaux se baignent, se désaltèrent, se rafraîchissent, cette eau m’intrigue. Depuis le début de notre boat drive on y voit à la surface des petites masses mousseuses qui flottent, partout, absolument partout. Lorsqu’on s’approche un peu plus des berges, spécialement à l’endroit où un aigle pêcheur trempe ses pattes on la voit, cette mousse, agglomérée sur la rive, immonde, jaunâtre. Cette mousse là elle vient de la pollution de l’eau et cette pollution elle vient malheureusement des populations qui se trouvent dans le parc ou à ses abords.

A savoir que l’Ouganda n’est pas un pays propre au sens européen du terme. Même si en France on a encore quelques dégénérés ignares qui jettent leurs ordures par terre on peut s’estimer heureux d’avoir un pays propre. La plus grosse gangrène de l’Ouganda pour moi c’est le plastique, ces bouteilles en plastique qu’on retrouve jonchant le sol, partout ou presque, que ce soit dans des pseudos décharges à ciel ouvert dans la rue. Les ougandais jettent tout par terre, en s’imaginant peut être que ça va disparaître par la grâce de je ne sais pas trop quel dieu. Mais non, ça reste là et parfois, après des intempéries monstrueuses comme ceux de la saison des pluies, ces bouteilles en plastique se retrouvent dans les fleuves, les rivières, les canaux.

Aussi bien que puisse faire les personnes qui gèrent le Queen Elizabeth Park ils ne peuvent tout empêcher et les bouteilles qu’on a pu voir flotter sur le canal Kazinga sont bien la preuve que même dans un parc national on retrouve les stigmates d’une société qui a évolué trop vite, trop mal en matière d’écologie. Alors forcément quand des gens vivent dans le parc on peut s’attendre à ce qu’ils ne soient pas une exception à la règle et que la Nature souffre à un moment ou un autre de cette présence humaine. J’ai été surprise de voir qu’il y avait des êtres humains qui vivent dans le parc, qui pêchent dans le canal ou les lacs attenants. Des communautés, des villages de pêcheurs, dispersés dans certaines zones, à quelques kilomètres des animaux. Même si je peux admettre qu’on ne veut pas mettre dehors des populations qui ont toujours vécus dans le parc le minimum serait peut être de les éduquer sur des sujets comme l’écologie et le recyclage, chose qui n’est clairement pas faite dans le parc.

Niveau conservation des espèces on n’apprendra rien de particulier durant notre boat drive, je rechigne un peu à poser des questions au guide de l’Uganda Wildlife Authority, à tort diront certains mais je reste persuadée que certaines personnes dont les employés de l’UWA ne peuvent pas toujours dire ce qu’ils pensent de la gestion du parc devant un parterre de touristes.

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A la recherche des chimpanzés des Gorges de Kyambura

Notre safari se poursuit par une seconde journée au Queen Elizabeth Park, toujours pas de game drive pour nous, on a misé sur une tout autre activité, une de celles qui me tient à coeur : le chimpanzee tracking. Pas de voiture, pas de savane mais une épaisse jungle dans les Gorges de Kyambura. Ces Gorges en plein milieu de la savane sont fantastiques à voir de haut, un énorme trou de plusieurs kilomètres de long dévoré par une végétation épaisse entourée de la savane presque déserte, une vision incroyable.

Il est encore tôt, il fait même un peu frais ( on a presque plus l’habitude ! ) quand on se présente au poste de contrôle juste avant les Gorges. Toujours accompagnés de notre chauffeur on rencontre notre guide, Adolf, et Brenda notre protectrice du jour armée de son fusil. On nous explique qu’on va aller à l’entrée de l’un des sentiers après avoir chercher un peu des traces, les chimpanzés n’ont pas été vu depuis 4 jours, les chances de les voir sont minuscules. Arrivés au point de départ on dit au revoir à notre chauffeur, on s’asperge de spray anti bestioles pour éloigner les éventuelles tsé tsé et on s’engouffre dans une descente vertigineuse vers le coeur de la jungle.

Faire un chimpanzee tracking à cet endroit est un coup de poker, encore plus que dans les autres chimp tracking que vous pouvez faire ailleurs. Ici il y a 24 chimpanzés qui se séparent parfois en plusieurs groupes ce qui n’est pas rare chez les chimpanzés, on appelle ça l’organisation fission-fusion. Les chimpanzés forment en fait un gros groupe qui va se séparer pour les besoins de la chasse ou les recherches de nourriture. Il est donc probable de les rencontrer mais seulement en petits groupes voire en un seul individu. Notre guide nous explique que dans les Gorges il n’y a pas que les chimpanzés mais aussi des éléphants, des léopards, des hippopotames, des crocodiles, des Hocheurs à nez blanc ( red tailed monkey en anglais ! ), des Colobes… Bref pas mal d’animaux qu’on peut trouver aussi dans la savane ! La probabilité de voir des éléphants est quand même assez faible puisqu’ils se réfugient dans la jungle lors des heures les plus chaudes; au niveau des léopards c’est presque impossible de les voir aussi, les félins sont rapides, discrets, presque intraçables.

Adolf devant, nous au milieu et Brenda avec son gros fusil derrière, on avance dans la jungle, à pas de loups pour nous, s’imaginant être comme les explorateurs d’un ancien temps à la découverte d’un mondre étrange et inconnu. On regarde de tous les côtés, dans tous les arbres. On examine toutes les bouses d’éléphants avec un regard de pseudo expert en crottes (“Elle est pas fraîche cette bouse mon sergent !“) et on avance, toujours plus profondément dans la forêt, suivant studieusement notre guide.

D’un coup il me fait signe de m’arrêter, je suis juste derrière lui, il recule doucement puis plus précipitamment m’entraînant dans sa fuite en arrière. J’essaye d’apercevoir ce qu’il a vu quand soudain, surgissant d’un buisson bas, un pangolin ! Un énorme pangolin ! Si vous ne voyez pas de quoi il s’agit je vous invite à aller ici. Alors que Prince Charmant essaye de me bouler du chemin pour photographier la bête, je regarde la scène, hébétée. Les pangolins sont normalement nocturnes, la probabilité d’en voir un et encore plus de jour est quasi nulle. C’est un animal menacée du fait du braconnage qu’il subit que ce soit pour récupérer des écailles et les vendre sur le marché asiatique ou pour sa viande que certains adorent. On trouve donc de moins en moins de pangolin sur la planète et on en trouve aucun en Europe puisqu’il est quasiment impossible de réussir à les garder en vie en captivité. Bref, j’imagine presque que de voir un pangolin au moins une fois dans sa vie, et un pangolin libre de surcroît, est une chance inestimable.

Après cette surprise de taille on continue notre route à la recherche des chimpanzés. On entend et aperçoit parfois des Hocheurs à nez blanc ou des Colobes mais pas de traces de chimpanzés. Au détour d’un sentier on s’arrête et Adolf nous montre ce qui ressemble à des ossements, éparpillés près d’un point d’eau. Ces os appartiennent à un éléphant qui serait venu mourir ici, près du point d’eau. Ce n’est pas rare de voir des carcasses ou des ossements d’éléphants proches des points d’eau, c’est aussi ça qui a créé la légende des cimetières d’éléphants, il semble en fait que les éléphants atteignant un certain âge et sentant peut être leur fin proche s’isolent du groupe près d’un point d’eau qui leur offre de quoi se nourrir et s’abreuver pour leurs derniers jours avant de mourir là. Adolf nous assure que cet éléphant est mort naturellement, ce n’est pas l’oeuvre des braconniers qui n’osent pas trop s’aventurer dans les Gorges du fait des rondes effectués par les guides avec les touristes. Et puis tuer des éléphants dans la jungle, dans des Gorges, s’avèrent plus compliqué que de les tuer en pleine savane.

Parce que oui le braconnage existe bien au Queen Elizabeth Park. Adolf nous dira, une fois dans la voiture, qu’ils recensent au moins un éléphant tué tous les mois voire plus. Le parc est grand, les braconniers de mieux en mieux équipés. Lorsque je lui demande s’il ne peut pas s’agir aussi des personnes habitants dans le parc il me répond d’un ferme non. Non, les personnes habitants dans le parc ne sont pas responsables des braconnages, selon lui l’utilisation de très lourdes armes empêchent les villageois des alentours de participer à ce genre de massacre, ça serait impossible de garder ce genre d’armes chez eux. On n’en saura pas plus du braconnage avec l’impression qu’eux n’ont plus n’en savent pas plus et qu’il s’agit presque d’une triste routine.

Je vais un peu vite dans l’histoire de notre J2 ! On n’a toujours pas trouvé les chimpanzés, on avance toujours dans la jungle. D’ailleurs, j’ai dit 24 chimpanzés au début mais notre guide nous apprend que le groupe s’est en fait agrandi d’un nouveau membre depuis quelques semaines ce qui porte le groupe à 25 individus. Ceci étant les voir reste toujours compliqué, la forêt est dense et il y a toujours la possibilité de prendre une route sans voir de chimpanzés alors qu’ils sont à quelques mètres de nous sur la droite. Peu importe, c’est le jeu de la Nature.

Alors qu’on voit un énième Hocheur à nez blanc se jeter d’une branche pour en saisir une autre Adolf nous fait signe de nous arrêter. Presque suffocant d’excitation il nous montre au loin une forme noire au milieu du sentier et nous dit tout bas “chimpanzee, chimpanzee”. Je me baisse et j’aperçois un peu mieux l’animal. On se rapproche doucement tout en gardant une distance respectable, un chimpanzé agacé peut vous tuer à une vitesse que vous ne soupçonnez pas. Il nous a vu, entendu, senti. Il se dirige doucement vers l’arbre le plus proche et commence à grimper pour se percher sur une branche en hauteur, nous observant de haut d’un regard dénué d’intérêt. Nous voilà juste en dessous de son arbre, à l’observer avec des grands yeux, ignorants même les fourmis rouges qui nous dévorent les jambes.

C’est un jeune chimpanzé nous dit Adolf, il doit y avoir sa mère dans les parages. On observe autour de nous, on erre un peu dans la zone mais sans succès. On décide de retourner voir ce jeune chimpanzé, toujours perché dans son arbre, pour s’émerveiller encore quelques minutes de sa présence. Il prend des branches, les entremêlent les unes avec les autres, c’est à mon tour de suffoquer d’excitation, je regarde Prince Charmant et lui murmure “il fait son nid, son lit pour la nuit”. Les animaux en captivité n’ont pas l’occasion de faire un lit pour la nuit ou ceux qui l’ont ne le font pas à la vue des visiteurs. Voir un chimpanzé sauvage faire son nid a été un moment intense pour moi, l’occasion d’assister à un tel spectacle est fantastique, j’en étais extatique et je sais que je le serai à chaque fois que j’aurais l’occasion de le voir.

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Sauf que pour ce voyage là je savais que ça ne serait pas possible. On a quitté la zone des chimpanzés et on en rencontrera plus pendant le reste du voyage, ou en tout cas il n’y en a pas sur notre route. J’aurais voulu rester là pendant des heures, à attendre qu’il termine sa sieste, à attendre qu’il bouge, à attendre qu’il rejoigne son groupe. Mais il a fallu repartir, regagner le monde des êtres humains qui me désillusionne plus qu’il ne m’enchante parfois.

On aura vu qu’un seul chimpanzé dans les Gorges, certains diront que c’est nul de payer pour voir un seul chimpanzé mais nous, on s’est senti chanceux, on se sent toujours chanceux d’avoir vu ce seul et unique jeune chimpanzé sauvage d’Ouganda. Il y a d’autres chimpanzés dans le pays, des chimpanzés qui vivent protégés dans les forêts et d’autres dans des zones non restreintes par l’appellation Parc National. Tous ces chimpanzés restent en danger, même en Ouganda où ils ne sont pourtant pas chasser comme me l’expliquait Lilly de Chimpanzee Trust. Ces chimpanzés sont quand même menacés par la déforestation mais aussi par une chasse indirecte, par des pièges placés par des chasseurs de gibiers qui ciblent d’autres animaux mais qui attrapent des chimpanzés qui, à force de se débattre, se retrouve avec un piège profondément incrusté dans leur peau, un membre en moins.

Il resterait environ 5000 chimpanzés en Ouganda et le pays n’a aucune idée de comment évoluer cette population, est ce qu’elle tend à grossir ou s’épuise-t-elle petit à petit comme temps d’animaux sur le continent et la planète ? La directrice de Chimpanzee Trust a pu nous donner des pistes sur l’avenir de la conservation des chimpanzés dans le pays mais ce futur reste tellement incertain qu’on reste là à espérer que les choses se passent bien pour eux, que tous ces efforts pour sauvegarder l’existence de nos cousins aboutissent sur une protection et un accroissement de la population. Sans argent, le pays manque de ressource pour établir un rapport quant aux populations de chimpanzés en Ouganda mais ce qui reste sûr c’est que les chimpanzés des Gorges de Kihambura se porteront bien tant que les Gorges survivront.

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2 Commentaires

  1. Pas de mot pour dire à quel point, je trouve que tout ça est magnifique… Vraiment… OUAHHHHHHH… ça fait rêver ¤.¤

    • C’est super beau oui 🙂 Une petite bulle loin de la civilisation !


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